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Unlimited Miles
26 septembre 2007

La Fedaia versant Est: un col en son Dolby Digital THX Surround.

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les lacets de la Fedaia

   

Depuis notre arrivée à Selva, j'ai compris que pour  pratiquer le vélo dans les Dolomites il fallait savoir s'adapter à l'humidité. Nous allons avoir aujourd'hui la démonstration grâce à la Fedaia que le vélo en montagne est avant tout l'école de l'humilité. La descente de ce col m'avait particulièrement impressionné dimanche dernier, je m'étais promis d'y retourner avec Laure pour tester cette fabuleuse ligne droite où les cyclos se transforment en piéton, où les moteurs sont à l'agonie et les freins en fusion. Le cycliste a cela de particulier: une faculté étonnante à s'embarquer dans des traquenards en parfaite connaissance de cause.

Pour éviter d'avoir à escalader le Sella dans les deux sens, nous allons changer de point de départ en nous rendant en voiture à Canazei. Cette option nous offrira la possibilité d'effectuer une boucle raisonnable tout en découvrant de nouveaux cols en plus de la Fedaia.

Mercredi 22 août: passo di San Pellegrino (1918m), passo di Valles (2033m),  passo di Fedaia (2057m), 106 km et 2750m de dénivelée.

 

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Avec le retour attendu du soleil, les touristes sont de sortie, nous allons mettre près d'une heure pour faire les 25km qui nous séparent de Canazei. Ici, il faut savoir prendre son temps, le rapport distance/temps n'est pas le même qu'ailleurs.

C'est une fraîcheur surprenante qui nous accueille à la sortie du Berlingot, guère plus de 8 ou 9°, le soleil n'a pas encore réussi à réchauffer l'atmosphère humide du Val di Fassa. Les cyclistes que nous avons croisés étaient équipés tout en long, jambières, veste, gants, ce n'était pas de la frime.

   

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Ambiance fraîche mais ensoleillée au départ de Canazei

   

Notre ballade du jour débute par une mise en jambes sans douleur avec la descente du Val di Fassa jusqu'à Moena. Cette vallée est l'un des axes principaux des Dolomites, nous croisons en sens inverse un flot ininterrompu de véhicules au ralenti sur des kilomètres, pare choc contre pare choc. C'est absolument incroyable, je ne pensais pas qu'il puisse y avoir une telle affluence en montagne. Moena  est un charmant village, mais le plaisir est gâché par  une agglutination de voitures dans tout les sens, un seul désir: fuir cette vallée.

Au calme dans le San Pellegrino.

C'est avec un grand soulagement que nous abordons l'ascension du passo di San Pellegrino, nous avons quitté le trafic intense du Val di Fassa pour un itinéraire beaucoup moins fréquenté. Apprécier le silence fait partie de mes petits plaisirs en vélo, j'aime être seul avec le bruit de ma respiration et la musique d'un vélo bien réglé. Une moto qui envoie les gaz, une voiture qui rase d'un peu trop près et le charme est rompu. Plaisir égoïste, plaisir solitaire, le vélo en montagne c'est un peu les deux à la fois.

Le San Pellegrino depuis Moena est sympathique, mais sans plus. L'ascension est irrégulière avec parfois des portions supérieures à 10% qui peuvent se révéler délicate. La sortie de Moena est rude avec 1km à 10% de moyenne, puis la route pénètre dans un vallon boisé offrant peu de paysage, où de bonnes portions de récupérations alternent avec de fortes rampes. C'est environ 11km et 800m de dénivelée qu'il faudra franchir pour atteindre le sommet où l'on retrouvera plusieurs auberges accueillantes, comme souvent le sommet de ce col est aussi un vaste domaine de ski en hiver.

 

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Le sommet du San Pellegrino

   

Les amateurs de grosses sensations se régaleront dans la descente sur Falcade. La route est belle avec une pente atteignant des moyennes kilométriques proches des 14% par moment. Ludique et technique cette descente alterne lignes droites à haute vitesse, freinage, lacets et relances.   

J'ai abandonné Laure pour m'offrir un petit aller retour au passo di Valles, nous nous retrouverons dans la Fedaia.

Le passo di Valles : petit mais costaud

Au plus fort de la descente sur Falcade, au ponte de la Sega, un panneau  indique une bifurcation sur la droite en direction du discret mais redoutable passo di Valles. Un petit détour pour moi pour un 2000 de plus, comment résister à la tentation? La grimpée est sévère, en 7km il va falloir s'élever de 650m, ce qui donne une pente qui flirte souvent avec les 10%. Comme un collectionneur boulimique je dévore ce nouveau col sans en perdre une miette. Habitué depuis quelques jours à un décor minéral brutal, le passo di Valles surprend par son caractère paisible où les alpages aux couleurs chaudes partagent l'occupation des lieux avec des forêts généreuses.

   

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La descente par le même itinéraire est à nouveau supersonique,  belle route, forte pente,  en un clin d'œil je me retrouve à Cencenighe 1300m plus bas.. Cette vallée intérieure est magnifique, beaucoup moins fréquentée que le Val di Fassa et pourtant pleine de charmes. 13 km en pente douce conduisent à Caprile au pied de la Fedaia, en passant par  Alleghe où l'on ne manquera pas de jeter un œil sur son lac.

Les affaires vont maintenant se compliquer.

L'enfer de la Fedaia.

 

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Le versant Est de la Fedaia est impitoyable, il possède le mérite de vous renseigner clairement sur vos possibilités physiques du moment. Pour se faire une idée de la difficulté, on pourra le comparer à un Puy de Dôme à 2000m d'altitude, tant la pente est soutenue dans le final. En dehors du Mortirolo, j'ai rarement eu l'impression de lutter autant contre la pente.

 

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Pourtant tout commence normalement au départ de Caprile, un panneau  nous annonce le sommet de la Fedaia à 15km, un rapide calcul avec l'altimètre indique 1050m de dénivelée à gravir, donc aucun motif apparent de s'inquiéter. Au fur et à mesure de la progression, notre intuition est en alerte, il semble bien qu'un piège soit en train de se refermer. Au kilomètre 7,5, après avoir traversé Rocca Pietore et col di Rocca, seulement 280m ont été escaladés, ce n'est pas bon signe pour la suite étant donné qu'il ne reste que 7,5km et 770m de dénivelée, soit plus de 10% de moyenne.

Un coup d'œil sur la configuration du terrain confirme le sentiment d'inquiétude, de tous les côtés le regard butte contre des versants abrupts, mais par où va passer cette route?

Les hostilités débutent par une série de lacets entrecoupée d'un tunnel où la pente affiche déjà un bon 9% de moyenne durant 2km. Il ne faut surtout pas s'emballer dans cette portion car après la traversée de Malga Clapèla une horreur attend le cycliste. Les responsables de la construction de cette route n'ont jamais dû pratiquer le vélo.

 

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Les 3 km qui suivent constituent un morceau de bravoure athlétique. Durant une ligne interminablement droite, démoralisante si le coup de pédale n'est pas aérien,  la pente ne descendra plus en dessous des 12%. Le profil annonce 1km à 11,9% de moyenne suivi de 2km à 12,6% de moyenne. Les possibilités de récupération sont inexistantes sur ces 3km. Deux solutions: fixer son moyeu avant pour ne plus rien voir, ou alors fixer au loin un hypothétique replat. Dans tous les cas il faudra un moral en béton et mobiliser toutes ses ressources pour franchir ce secteur. J'ai retrouvé Laure qui hésite à me maudire pour l'avoir entraînée dans ce chantier.

 

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Cette ligne droite mémorable finit par déboucher au niveau d'un chalet sur un léger replat d'une centaine de mètres, 7% environ mais cela suffit pour récupérer après ce que l'on vient de subir. La partie n'est par encore terminée, la route dessine au-dessus de nous un bel enchaînement de lacets, parfois complètement artificiels, témoin de l'énergie qu'il a fallu pour construire cette route. De l'énergie il en faudra aussi pour venir à bout des deux derniers kilomètres, le dernier se négociant à 11% de moyenne avec un passage à 15%. La fin de la Fedaia est fabuleuse, chaque lacet offre un point de vue différent sur le chemin parcouru, les perspectives fuyantes permettant d'apprécier à sa juste valeur la rudesse de la pente.

 

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C'est avec beaucoup de soulagement et un brin de satisfaction que l'on atteint le sommet de la Fedaia, après tant d'efforts consentis, le lac et le massif de la Marmolada n'en sont que plus éclatants.

Pour Laure et moi, il ne nous reste plus qu'à nous laisser descendre jusqu'à Canazei et goûter à quelques spécialités locales pour nous restaurer.

 

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Au coeur de Canazei

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Commentaires
H
Bonjour Hugues et Laure,<br /> J'ai encore sauvegardé quelques très belles photos dans ma réserve.<br /> Félicitations à Laure.<br /> Bravo pour les textes, c'est passionnant! <br /> Bonne continuation.<br /> Bonjour de Vincennes.
A
Hello Hugues !<br /> <br /> J'ai de bon souvenirs de cette région, Canazeï entre autre ne peut s'oublier et par son nom et par ses maisons en bois d'une déco chargée mais superbe, une seule gêne ces hordes de motos dans les cols, ah c'est pas les cols Pyrénéens mais j'y retournerais sans aucun doute.<br /> Beaux récits, belles photos y'a de la matière mais quand on aime...<br /> <br /> A bientôt André.
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