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Unlimited Miles
8 août 2007

Le DFU 2007: 20 h de bonheur !

181805_1_Peut-on parler de bonheur quand on passe 18h30 (20h arrêts compris) sur son vélo, à appuyer sur les pédales et à souffler pour escalader des cols, en passant par divers états, de bien, jambes légères, moins bien, jambes lourdes, soif, faim, estomac en vrac, allure "comme on peut" jusqu'à "tout va bien, même plus mal aux jambes tellement je suis grisé(e) par les endorphines" ? Certains vous regarderont comme des zombies, d'autres en se demandant si vous ne vous payez pas leur tête, d'autres penseront "mais c'est pas ça la vraie vie", et enfin quelques uns tout de même vous envieront. Comme on dit, tout est relatif, chacun a sa propre conception de la vie, et pour certains cyclistes dont je fais partie, quand la météo est au beau fixe, que vous êtes dans une région qui regorge de cols magnifique à savoir l'Ubaye, et que vous attendez ce rendez-vous depuis 1 an, oui, passer sa journée et même plus à escalader les 7 cols proposés par Claude Véran et son équipe, correspond à une journée de bonheur. Parmi ceux qui vous envieront, ces malades de la mucoviscidose pour qui nous allons pédaler, puisque la moitié du prix d'engagement est reversé à l'association qui lutte contre cette maladie génétique. "C'est un privilège que vous avez de pouvoir souffrir dans ces cols" nous lance Claude juste avant le départ, et il a bien raison.
 

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Comment se retrouve t’on un samedi matin à 5h30 sur la ligne de départ des DFU (Défis des Fondus de l'Ubaye) avec au programme 325km et 6 800m de dénivelé reparti sur les cols de Pontis, St Jean, Allos, Cayolle, Cime de la Bonette, Vars et montée de St Anne de la Condamine, alors qu'il n'y a pas si longtemps les sorties de plus de 150km vous effrayaient à force d'hypo et de coups de bambou monstrueux ?! Disons qu'avoir un mari qui s'est lancé sur les épreuves "ultra" aide un peu à se tourner dans cette direction, même si cette notion d'ultra est relative, pour certains la barre est à 200km, pour d'autres dont je fais partie entre 300 et 400 - pour l'instant J -, et enfin pour une minorité, il n'y a pas de limite ! Après 2 participations à la Wysam 333 (333km mais seulement 3300m de dénivelé) et la formule des 5 cols de ces DFU en 2006, cette année, je monte ma limite "ultra" d'un échelon avec  les "7 cols" à mon programme !
 

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A côté de moi, Anne Haycraft, mon amie de Laragne avec laquelle j'ai déjà partagée quelques beaux tours cette année dont le brevet de 300 km qualificatif pour PBP de gap, et son mari Mark, ainsi que des copains "chamroussiens". Hugues, encore blessé suite à sa chute à la RATA le week-end précédent, n'est pas sur le vélo mais … dans le berlingot, appareil photo autour du cou : aujourd'hui, on inverse les rôles !  Bien que l'organisation ait tout prévu pour que les concurrents puissent avoir des sacs personnels à différents points du parcours, il nous propose de s'occuper de nous comme de petites reines J  Il était de toute façon prévu qu'il me fasse l'éclairage avec la voiture pour la nuit, je n'ai encore pas pratiqué cet exercice en montagne. Finalement, il va vite s'apercevoir qu'on ne s'ennuie pas lors d'une assistance !

 

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La moulinette dans Pontis.

On s'élance sous les premières lueurs de l'aube, Barcelonnette encore tout endormie. L'allure est cool, c'est super, pour une fois que je ne fais pas les frais d'un départ tambour battant ! On discute à droite à gauche, la journée va être longue. Le peloton descend ainsi la vallée de l'Ubaye jusqu'au pied du col de Pontis. Là, petit braquet toute, ça attaque directement par de fortes pentes. Seulement 4 km, mais des km qui oscillent entre 9 et 11% sur une petite route rugueuse, chacun essaie de trouver son rythme et son souffle. Tiens, voilà JP qui me rattrape, il discutait derrière avec Anne. Quelques mots échangés et il s'envole tranquillement, me laissant sur place à ma moulinette ! 1er sommet, la vue sur le lac de Serre-Ponçon est magnifique sous les premiers rayons du soleil. Descente scabreuse, attention aux éventuelles chèvres, et on retrouve la route principale qui nous ramène sur Le Sauze du Lac.

Du renfort dans le col St Jean.

080031_1_Ce col est une simple formalité, mais, comme m'aura prévenue Hugues, au milieu d'une telle enfilade de cols, rien n'est une formalité, chaque col, petit ou grand concourt à augmenter la fatigue du cycliste. Redescendre du Sauze, remonter un bout de la vallée de l'Ubaye et prendre à droite toute pour escalader le col St Jean: 9 km mais des pentes de 5-6% seulement. Et cette année encore, nous avons le vent dans le dos : c'est mauvais signe pour le retour sur Barcelonnette! Hugues me propose un bidon, mais il m'en reste l'équivalent d'un entre le ½ bidon de Maxim et le ½ bidon de 640 chocolat. Je me fais … tendrement engueuler, déjà 3h de route et juste un bidon d'avalé, je le sais, ce n'est pas bien, je lui rappelle assez souvent qu'il faut boire quand c'est moi qui suis dans la voiture ! Aller, j'attrape un bidon de 640 version praliné que je me fixe de terminer pour Barcelonnette. J'ai retrouvé mon compagnon de route de l'an dernier, Matthieu LUNEL, avec qui j'avais passé 2h sous un abri bus l'an dernier en attendant que l'orage veuille bien cesser. Au sommet, le temps de faire tamponner ma carte, et voilà Anne qui arrive en galante compagnie. Super, voilà du renfort pour le retour sur Barcelonnette ! Et effectivement, la remontée de l'Ubaye vers Barcelonnette sera assez désagréable, Maître Eole ayant décidé de nous durcir la tâche.

Mon petit train d'ultra dans Allos.

   
110033_1_Après une petite pause ravitaillement flan pâtissier-coca à Uvernet, il s'agit d'escalader le col d'Allos. Je le connais bien, il ne se passe pas une saison sans qu'on ne vienne y promener nos roues au moins une ou deux fois. 18 km, des pentes entre 7 et 10 % avec un bon replat au milieu, ce col est magnifique. Petite route étroite qui serpente tout d'abord dans les bois, puis dans les alpages, aux ¾ de la montée on a même droit à un beau point de vue sur le départ du col de la Cayolle, le prochain sur notre liste. Hugues fait des pauses photos, je suis dans la phase "les jambes tournent bien", j'ai pris mon petit train d'ultra comme il me dit. Petit coucou à JP puis à Mark, ensuite Philippe et enfin Jacques et Igor qui redescendent déjà. A ce petit jeu, je vais pouvoir constater l'écart qui se creuse entre eux et moi au fil des ascensions !! La température commence à monter, on ne va pas s'en plaindre, en très mauvaise auvergnate je préfère avoir chaud que froid ! Au sommet, pointage de la carte de route, nouvelle pause flan pâtissier (hum, keskechébon, pour une fois c'est moi qui peut en profiter !), Anne arrive à son tour ainsi que Matthieu. J'attaque la descente avant eux, je sais qu'ils me rattraperont. Heureusement pas trop de motards cette année, mais cette petite route si agréable à monter l'est un peu moins à descendre pour la piètre acrobate que je suis. Nouvel arrêt à Uvernet, très bref, juste le temps du regroupement et on repart à l'assaut du 4ème col de la journée.

 

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Le temps file dans la Cayolle.

Déjà 5h à pédaler, je n'ai pas vu le temps passer. C'est l'avantage d'escalader des cols, surtout dans ces conditions, on est concentré sur notre effort, sur le paysage, boire, manger, il n'y a plus de rapport au temps, et pourtant j'ai le chrono affiché sous les yeux pour gérer mes prises alimentaires. Le départ est gentillet, notre allure aussi, on est passé au stade "jambes lourdes". Très long, ce col permet une mise en effort progressive, puisque avec 26km au total, on alterne 121526_1_tout d'abord pendant 18 km les passages soutenus avec de bons moments de replat. L'eau de la fontaine du Villard des Arnauds  est une invitation à l'arrêt "bidons", à côté, des touristes attablés qui sirotent leur apéro nous encouragent plus ou moins jovialement. Je commence à ressentir une douleur au genou gauche, c'est quoi c'binz, j'ai rien eu de toute la saison !  A Bayasse, le petit pont de bois franchi, on passe à l'assaut des alpages et la pente se fait plus forte. Hugues nous y attend, il n'ira pas plus haut car il a dans la voiture les affaires chaudes de Mark pour la Bonette, et Mark a déjà une bonne avance sur nous. Le vent est du nord, mais il nous gène encore ici pour atteindre le sommet L  Petit coup de moins bien à 3 km du sommet, et les marmottes sont avares de leurs encouragements. Mais où sont-elles passées ? Petite croix dans la case "Cayolle", et de 4, on peut se laisser glisser jusqu'à barcelonnette pour la pause repas prévue par l'organisation. Le final de la descente est assez pénible avec les thermiques, courageusement, je reste planquée dans la roue de Matthieu qui ne me demande rien ! Ah ces filles ! Barcelonnette, 15h15, le ciel est bleu, pas de menace orageuse, on se programme donc un arrêt de 30mn. Dans la salle, d'autres participants se restaurent aussi, salade de lentilles, fromage, gâteau de riz, salade de fruits, sandwich à la demande, les bénévoles répondent à toutes les demandes de ces cyclos venus donner un peu de leur souffle. Pour moi ça sera sandwich au fromage et flan pâtissier, 2 parts m'attendent dans la glacière, je ne voudrais pas qu'elles s'abîment ! Il s'avérera un peu plus tard que ce n'était pas spécialement le plat du jour adéquat !

 

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Sauve qui peut dans la Bonette.

174111_1_J'aime bien l'humour de Claude Véran : "oh non, la Bonette, c'est pas méchant, il n'y a rien de dur, y'a juste la cime où les pourcentages sont plus forts" ! Et avec l'accent du sud s'il vous plait ! Nous repartons, Anne, Matthieu et moi, accompagnés d'un 4ème compagnon, sur un petit train digestif. Heureusement, nous avons 9 km jusqu'à Jausiers, en faux plat montant mais avec une bonne brise thermique dans le dos, c'est cool, petit plateau, les jambes tournent toutes seules ! Cette allure promenade du dimanche ne peut hélas pas durer. A Jausiers, Anne s'arrête au van qu'ils ont laissé la veille pour prendre des affaires chaudes en prévision de la descente. Je continue tranquillement, bifurcation à droite, et on attaque la longue montée qui doit nous mener jusqu'à 2800 m. Bien que la pente ne soit pas dantesque, seulement 7-8%, je sens tout de suite que le 5ème col s'annonce laborieux. Je croise JP puis mark qui en ont déjà fini, oulala, au moins 3h d'avance ! "Anne est au van", "ok, good luck". Hugues qui nous attendait à Jausiers me rattrape un peu plus loin : "si je monte jusqu'à la côte 2000, ça te va ?" J'ai basculé le compteur sur les fonctions température et altitude depuis quelques temps, je suis à 1 500, je ne calcule pas trop: "oui oui", et il s'éloigne. Prochain objectif donc, altitude 2 000. Oui mais là, je suis passé à la181224_1_ phase "bide en vrac, fuyons, rien ne va plus", donc 500m de dénivelé, ça fait beaucoup ! Le doute m'envahit, comment vais-je pouvoir arriver au sommet ? Sans parler des 2 cols suivants ! Mais arrêter ici serait un échec, tous ces mois à penser à cette journée, à escalader des cols pour se préparer. J'écarte très vite cette idée d'abandon de ma tête. Ne pas penser à la suite, se donner des objectifs de très courte distance, 5-6 km maxi, être patiente. "La patience est une des principales qualités dont doit faire preuve le cycliste ultra", je ne sais plus où j'ai lu ça, mais on en a parlé quelques fois ! Le vent contre toi tu as, plus tard il t'aidera, la pluie sur toi s'abat, plus tard le soleil brillera, les jambes te manquent, plus tard elles seront fortes (enfin, si tu peux manger !), ah oui et "was ich will, ich kann" (traduire: je suis capable de faire ce que j'ai envie de faire), ça , c'est Fashing qui l'a dit ! Aller, arrête de cogiter, point intermédiaire, altitude 1 800. Je ne vois plus Matthieu, je m'efforce d'aller de virage en virage. J'ai vraiment les jambes dans du coton, si je veux faire les 7 cols, il faut absolument que je mange. Oui mais quand l'estomac veut plutôt régurgiter qu'ingurgiter on fait comment ? 640 ! J'ai lu que sur la RAAM, les concurrents tournent essentiellement à l'alimentation liquide pour palier à ces problèmes de digestion, et cela a bien fonctionné pour Hugues au RPE et à la RATA. Progresser de virage en virage, faire le point sur l'altitude, 1 700, 1 750, 1 800, … oh super, le berlingot est là ! Je m'arrête, épuisée. Hugues me sort le pliant, et me prépare un bidon de 640 000000_2__1_façon bouillie. J'essaie tant bien que mal d'avaler cette soupe épaisse –parfum chocolat tout de même- quand Anne arrive à son tour et s'arrête à notre hauteur. Eclats de rire ! "Je suis dans le même état que toi" me lance t’elle. On prolonge l'arrêt de 5mn puis on repart. Péniblement, ou devrais-je dire lentement, on avance, chaque coup de pédale nous rapproche un peu plus du sommet, Hugues nous encourage tous les 500m et fait chauffer l'appareil photo. Juste après la mini descente, très bref moment de relâche pour les jambes, mon estomac se révolte vraiment, je n'ai plus trop de solution que celle de le soulager ! Un autre concurrent attentionné s'arrête à notre hauteur, et me propose son aide, c'est gentil, mais là, je peux me débrouiller toute seule ! On repart à la poursuite du berlingot à 8-9 km/h , il nous attend quelques centaines de mètres plus haut. Nouvelle pause coca. Aller, le passage raide du verrou rocheux et c'est le petit lac et son replat. La cabane militaire, un autre replat, finalement, on se rapproche petit à petit de cette cime. Je n'ai pas vu l'heure tourner, la luminosité a changé, il y a un calme reposant bien que notre pratique le soit beaucoup moins. Au détour d'un virage, elle se montre finalement, brutalement,185220_1_ complètement dénudée, cette cime tant convoitée ! Le kilomètre avant d'arriver au col de Restefond est beaucoup plus facile, permettant de recharger les accus ! 500 m à 10% pour en finir avec cette ascension, curieusement, j'ai retrouvé des forces, sans doute l'ivresse des cimes ! Là haut, l'équipe de bénévoles nous attend avec du thé chaud et le sourire, malgré les heures d'attentes. On fait pointer notre carte, je me change dans la voiture, même si l'allure n'a pas été vive, on a bien transpiré, et je crains la fraîcheur qui s'est maintenant installée à 2 800 m d'altitude, il est tout de même 19h. Je ne lésine pas, sous-vêtement sec, veste manches longues, gore tex, je sais que Yves Chizelle a abandonné la RATA 2005 suite à une hypothermie, faute de s'être bien couvert la nuit. La descente sur Jausiers est un pur plaisir, personne sur la route, temps calme, juste le bruit du vent dans les oreilles.

 

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Col de Vars: les hommes au volant, les femmes sur le vélo.

Arrêt sandwich /lumières au van à Jausiers, Mark a laissé un petit mot lors de son passage quelques heures plus tôt: "Hi everybody". Curieusement, je me sens sereine. Non pas que je pense avoir retrouvé des jambes de feu, mais je sais que j'arriverai à passer les 2 dernières grimpées, il ne reste plus que 2 fois 7 km à escalader, je connais Vars, St Anne est du même acabit, je suis à la bonne école, j'ai vu Hugues prendre son train de sénateur pour passer les derniers cols de la RATA et du RPE, il suffit de trouver l'allure qui nous convient, celle qui ne brusque pas le cœur, et la volonté fera actionner les muscles.

Anne prend un bon train dans la vallée qui nous mène au croisement avec le col de Larche. Je profite égoïstement de son long relais. La nuit commence à tomber, on croise Pascale, la 3ème féminine qui s'est engagée sur les 7 cols, ainsi que Matthieu et 2 autres concurrents, ils filent sur leur dernière grimpée. Les conducteurs des quelques voitures passant par là doivent nous prendre pour des fêlées, mais non, nous sommes tout simplement des fondues ! St Paul sur Ubaye, on ne distingue presque plus la route, seul un petit bout d'asphalte juste devant nous apparaît sous l'éclairage de nos lampes et des phares du berlingot. On attaque la montée proprement dite du col de Vars, on prend chacune notre train, à 10 m l'une de l'autre ! Une voiture nous double en klaxonnant, c'est Claude Véran, venu prendre des photos et encourager les derniers résistants. Soudain, j'entends quelqu'un qui court à ma hauteur, je vois Mark qui arrive vers moi en me faisant signe de ne rien IMGP1523_1_dire à Anne juste devant. Il arrive par surprise à sa hauteur, on s'arrête tous, gros éclats de rire et grand moment de bonheur. On se retrouve 2 nanas plantées à 9 à l'heure (je gonfle un peu, on arrondit toujours à la valeur supérieure !) dans le cols de Vars à 22h00 un samedi soir de juillet, avec chacune son homme dans la voiture suiveuse ! Quel tableau ! Et qu'est-ce qu'ils ont dû se raconter pendant ces 2 dernières ascensions! On reprend notre effort, je sens que les jambes retrouvent un peu de vigueur, mais le genou couine un peu, tant pis, il faudra qu’il tienne. Une petite minute de pause au milieu des 4 km à 10%, un petit vent contraire souffle encore, il devait être bien fort et freiner méchamment la progression des concurrents quelques heures plus tôt, j’ai déjà testé ! Le clair de lune nous permet de distinguer les sommets environnants, masses encore plus sombres que le ciel lui même. Finalement, nous arrivons au sommet vers 23h00. Deux autres concurrents sont là, essayant de se réchauffer avec du café. L'équipe qui nous accueille est toujours aussi chaleureuse. Je remets le gore-tex, avale 2 parts de quatre-quarts (c'est bon signe), me fait sermonner parce que je n'ai pas assez bu, et on s'élance dans la descente. J'appréhende un peu car je n'ai encore jamais descendu un col de nuit. Vous me direz, avec la voiture, on voit déjà nettement mieux que sans, mais il faut rester vigilant notamment dans les virages où d'un coup on se retrouve dans le noir. On n'est pas des plus rapides, mais je ne le suis déjà pas de jour ! La vallée jusqu'au pied de St Anne est vite avalée, à cette heure, nous avons la chance de ne pas être freinées par les thermiques.

St Anne la Condamine au clair de lune.

IMGP1527_1_St Anne étant une station, on ne parlera pas de monter le dernier col, mais de la dernière grimpée de cette belle expérience. Pause déshabillage, la température est assez douce ici, du moins pour un milieu de nuit à 1 000 m d'altitude. Hugues nous prévient que la pente devient sévère au bout de 2-3 km. On attaque (le mot est un peu fort je le reconnais) cette ultime difficulté de la journée (là aussi, mais faut-il encore connaître la véritable définition d'une journée : 24h ou bien "période où la lumière du jour vous permet de distinguer où vous mettez les pieds"?), mes jambes tournent maintenant presque toutes seules, j'ai l'impression d'avoir mis en route la fonction "marche automatique", je crois que je suis dans la phase "même plus mal aux jambes tellement je suis bourrée (mais je tiens encore la route) d'endorphines", cette phase dont m'avait parlé Jean-Charles lors de notre préparation pour la Wysam 333 en 2005 et dont j'étais hyper jalouse ! Maintenant je sais ce que c'est , malgré la pente (10-12% tout de même), vous appuyez tranquillement sur les pédales, pas une once d'essoufflement,  l'impression de pouvoir rouler ainsi pendant des heures et des heures, un calme intérieur impérial, rien ne peut vous arrêter. La route serpente, on croise de nouveaux nos 2 acolytes du col de Vars, encouragements. St Anne. Le contrôleur nous y attend à la lumière d'une cabine téléphonique, vestige du 20ème siècle que l'on trouve encore dans des coins isolés de notre civilisation hyperactive au téléphone portable greffé à l'oreille, même pour aller à carrouf. Il est aussi content que nous, le dernier concurrent n'est plus très loin (et non, on n'est pas les dernières !) et lui aussi va pouvoir aller se coucher. Il est 00h30, "ah, tout de même !". Je n'ai vraiment pas vu l'heure passer ! La descente sera presque plus douloureuse que la montée ... pour les mains ! La route est en mauvais état, on est constamment sur les freins, un peu trop parait-il ! Ils nous feront remarquer en bas qu'on est surtout descendu en ne prenant pas beaucoup de risque ! Moins vite que dans un faux plat descendant !

Dernière ligne droite, la vallée jusqu'à Jausiers puis Barcelonnette, on avale le faux plat descendant à vive allure (là, c'est pas exagéré, après 18h d'effort, on était sur un bon train), j'aperçois les lumières de Pra-Loup juste à côté de Barcelonnette, une pensée "heureusement que l'arrivée n'est pas là haut !" Mais finalement, on avait trouvé notre rythme ultra, on y serait bien monté s'il avait fallu !

Un 8ème l'an prochain ?

Barcelonnette: 01h30, cela fait presque 20h qu'on est parties, on a le sourire jusqu'aux oreilles l'une et l'autre, nos hommes aussi. Mark est affamé, il n'a même pas eu le temps de manger après avoir bouclé ses 7 cols, Igor nous attend lui aussi. On entre dans la salle des fêtes de Barcelonnette chaleureusement accueillis par les bénévoles qui attendent dans la bonne humeur les derniers concurrents. Le temps d'une bonne assiette de pasta bolognaises, et la fatigue nous tombe dessus. Plus c'est long, et moins il faut s'arrêter si on veut pouvoir repartir !

 

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Un grand merci à toute l'équipe de Claude Véran, de pouvoir nous faire vivre une telle expérience un peu moins égoïstement, on se sent moins ingrat à savoir que nos efforts ne seront pas gratuits cette fois, on en redemande même. Il est seulement dommage que toute l'énergie déployée pour mettre en place cette magnifique journée qui nous est proposée ne soit pas mieux récompensée par une participation plus élevée. Chacun peut y trouver son compte, 1, 3, 5 ou 7 cols, 4, 6, 10, 20h, juste pour le mieux-être de ces enfants malades.

   

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pour prolonger un peu le plaisir:
 
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Texte: Laure RICO

Photos: Hugues RICO / Claude VERAN (photos de nuit)

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Commentaires
G
J'avais apprécié le CR 2006 de Hugues dans le journal des fondus. Je découvre ce blog, le récit de Laure et les superbes photos. Bravo. Ca motive pour Juin 2008.<br /> Gilles
7
Bravo Laure pour l'exploit et le texte et Hugues pour les photos et l'assistance.<br /> <br /> Je vais essayer de faire lire ton texte à Bernadette; je suis certain qu'après elle sera partante pour le DFU 2008 même si elle ne se contente que de la "Bonette" et ...<br /> <br /> Serge,
R
Bravo pour ce compte rendu et pour les photos, cela m'a permis de revivre ce DFU 2007 quand même moins pluvieux que le 2006.Peut être à l'année prochaine pour le DFU 2008. <br /> Bravo aussi à tous les deux pour votre blog qui permet de découvrir ce qu'est l'ultra (à part le DFU je n'ai rien fait d'autre en la matière)et me donne des envies de tater la RATA et autres trucs de dingue!
M
Encore un beau reportage qui fait revivre cette magnifique journée.Le dfu est un grand bol d'air frais , une leçon, qui en mettant en parallèle la souffrance subie par les personnes atteintes de mucovisidose et les douleurs musculaires que nous pouvons endurer nous ouvre à l'essentiel, la chance de pouvoir pédaler en pleine montagne , qu'importe les excès d'acide lactique. Les sept cols ne sont pas de trop pour nous imprégner de cette évidence .
J
Merci Laure de nous avoir fait revivre cette excellente journée. Ton récit aborde toutes les problématiques de l'ultra : la patience, le bon rythme qu'il faut savoir trouver, les problèmes d'alimentation et surtout le plaisir que l'on éprouve miraculeusement après de longues heures de selle. Tu parles du "calme intérieur impérial" que tu as éprouvé . C'est exactement ça que l'on ressent. Bravo encore.
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